Un éclairage sur le lobbying et la représentation d’intérêts

26 . 10 . 2023 | Champs d'expertise

La question de la représentation d’intérêts et du lobbying adopte une place grandissante au sein du processus décisionnel en France et en Europe.

Qu’est-ce qu’un lobby ? Quel rapport avec la représentation d’intérêts ?

 

La Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique (HATVP) créée en 2014 a retenu trois conditions spécifiques qui permettent de définir les représentants d’intérêts.

  • Un représentant d’intérêts peut être une personne morale, c’est-a-dire une entreprise publique ou privée, un syndicat, un cabinet de conseil, ou même un consultant indépendant.
  • Un représentant d’intérêts doit exercer une activité de représentation d’intérêts, c’est-à-dire que son activité consiste à prendre contact avec des responsables de la décision publique afin d’influencer le choix d’une loi ou d’une règlementation.
  • Un représentant d’intérêts doit exercer cette activité de façon principale ou régulière, c’est-à-dire s’il y consacre plus de la moitié de son temps, et qu’il a réalisé plus de dix actions d’influence au cours des douze derniers mois.

En d’autres termes, le lobbying représente le fait pour une entité répondant à ces trois critères d’intervenir directement ou indirectement auprès des responsables publics, en vue d’influencer le processus de décision dans un sens qui sert des intérêts particuliers. On peut également parler de « représentation d’intérêts », ou même de « plaidoyer ». Une multitude d’acteurs sont engagés dans ce processus (entreprises, organisations professionnelles, associations, syndicats…), mais les cabinets de conseil spécialisés dans les secteurs publics et privés restent tout de même majoritaires dans ce domaine.

 

 

Un léger retour historique sur l’émergence du terme « représentation d’intérêts »

Les recherches sur les lobbies, soit la tendance de certains groupes organisés à intervenir de façon stratégique auprès des dirigeants politico-administratifs de l’État aux fins d’influencer les décisions publiques dans le sens de leurs intérêts, émerge aux États-Unis dès l’après-guerre. Bien que le terme de « groupes de pression » soit utilisé à l’origine, de nombreuses recherches ont démontré que ces groupes sociaux ne se contentent pas de faire pression, mais s’engagent directement dans l’élaboration, la formulation, et la mise en œuvre des politiques gouvernementales. En d’autres mots, les lobbies font partie intégrante du processus décisionnel. L’utilisation du terme de « groupe d’intérêts » s’est donc imposée comme plus pertinente.

 

Quelques lois majeures structurant le domaine de la représentation d’intérêts :

  • La loi Sapin II de 2016 (loi n° 2016-1691) : l’encadrement de la représentation d’intérêts reste assez récent sous la Vème République, puisque la loi Sapin II est la première loi à définir les représentants d’intérêts. Les partis politiques, les associations d’élus, les syndicats de salariés ou les organisations patronales ne sont pas considérés comme des représentants d’intérêt. Plus concrètement, la loi Sapin II lutte contre la corruption, impose une transparence de la vie publique, et modernise la vie économique française. Elle oblige les représentants d’intérêts à suivre des obligations déontologiques, telles que l’obligation de s’abstenir de remettre des cadeaux ou avantages quelconques d’une « valeur significative » à un responsable public, de verser une rémunération à un responsable pour qu’il prenne la parole dans un colloque ou une réunion, ou encore de vendre des informations provenant d’un responsable public.
  • La loi française sur la représentation d’intérêts de 2018 : Elle vient apporter des compléments à la loi Sapin II. En ce sens, les associations culturelles ont été exclues du groupe des représentants d’intérêts. De plus, un registre national obligatoire nommé « le répertoire » oblige tous les représentants d’intérêts à se déclarer comme tel depuis le 1er juillet 2017.
  • Les lois pour la confiance dans la vie politique de 2017 : Ces lois du 15 septembre 2017, également appelées « lois pour la moralisation de la vie publique », viennent renforcer la lutte contre le risque de conflits d’intérêts.

 

Un accent mis sur la transparence :

Comme expliqué précédemment, les représentants d’intérêts sont tenus de s’inscrire sur un répertoire numérique, dans lequel ils se doivent de communiquer des informations sur leur organisation, leurs actions, les moyens utilisés, et les sujets sur lesquels portent leur activité. Ce répertoire permet de mieux connaitre et mesurer l’impact de la représentation d’intérêts sur le processus décisionnel, mais également de voir l’activité du lobbying comme une activité reconnue et faire valoir les causes défendues. Les lobbies sont également tenus d’effectuer chaque année une déclaration d’activité auprès de la HATVP.

Les informations consultables sont :

  • Les questions sur lesquelles les représentants d’intérêts ont travaillé, leur objet, et le domaine d’intervention
  • Le type de décisions publiques visé et influencé (lois, actes, décisions, marchés publics, décision publique locale, européenne…)
  • Les types d’action déployés (rendez-vous, tracts, transmission d’expertise…)
  • Les catégories de responsables publics avec lesquels les représentants d’intérêts sont entrés en relation
  • Les tiers pour le compte desquels les actions de représentation d’intérêts ont été effectués le cas échéant
  • Les dépenses de représentations d’intérêts (rémunérations, frais, libertés et avantages accordés à des responsables publics) et les chiffres d’affaires des cabinets de conseil.

Il est également important de noter que les représentants d’intérêts qui ne respectent pas les formalités nécessaires s’exposent à une sanction pénale d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. Dans cette optique, de nouvelles lignes directrices ont été annoncées par la HATVP et sont entrées en vigueur le 1er octobre 2023. Parmi celles-ci :

  • La simplification les seuils déclenchant une obligation d’inscription, en tenant compte du seuil minimal de dix actions de représentation d’intérêts au niveau de la personne morale et non par personne physique comme c’était le cas jusqu’au 1er octobre 2023
  • L’extension de l’obligation de déclaration des activités aux entrées en communication initiées par les responsables publics
  • Permettre les déclarations consolidées pour les groupes de sociétés
  • Préciser dans les textes les critères des décisions publiques entrant dans le champ de la régulation de la représentation d’intérêts, en fonction de leur importance, par leur nature ou leurs effets.

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